La découverte du cinéma de Romero m’avait alerté, la récente programmation sur les revenants au Louvre m’avait confirmé dans cette conviction : le cinéma d’épouvante est un vecteur de critique.
Ring a marqué un renouveau du cinéma d’épouvante japonais mais cette veine, appréciée au point de susciter un remake américain (par Gore Verbinski en 2002), ne sort pas de nulle part. La filiation avec le plus traditionnel kaidan-eiga est en effet évidente : la maléfique Sadako est, comme la Dame Oiwa, alias le Fantôme de Yotsuya, un esprit vengeur dont la seule présence suffit à tuer.
Le film d’Hideo Nakata commence sur un mystère : pourquoi des lycéens meurent-ils tous une semaine après avoir visionné une mystérieuse cassette vidéo ? Très vite malheureusement, le film s’éloigne de ce point de départ étonnant pour prendre la forme d’une enquête. L’héroïne journaliste, déchiffrant une série d’indices laissés dans la vidéo, découvre un secret enfoui depuis quarante ans dans une ile lointaine.
On se souviendra moins des péripéties feuilletonnesques que de l’idée magistralement mise en scène dans l’avant-dernière séquence : le « monstre » se trouvait littéralement dans la télévision. De la part d’un cinéaste qui débuta dans le porno pour marché VHS, le propos ne manque de frapper et sonne comme un avertissement contre un médium qui met les images les plus choquantes à la portée de n’importe qui.
La scène la plus terrifiante de ce film prenant reste probablement, outre l’apparition finale de Sadako, celle où l’héroïne se réveille et trouve son jeune fils en train de regarder la fameuse cassette. La situation semblerait banale et a été vécue par bien des familles mais elle prend ici une dimension différente. C’est toute la puissance du film de Nakata que de dresser ces parallèles entre une action quotidienne et le danger métaphorique qu’il implique.
Le cinéma s’est peu intéressé à la télévision, sa petite rivale. Celle-ci n’est perçue que comme un symbole de la solitude des hommes (Tout ce que le Ciel permet) ou comme le signe de l’éloignement de l’univers dans une représentation médiatisée (Bienvenue, Mister Chance). Pourtant, les relations entre les deux supports méritent d’être étudiées et nul doute que Ring, à ce titre, est incontournable.
Avec Ring, Hideo Nakata parle des dérives nées de la technologie, ce qui semble d’ailleurs être une constante de son œuvre. On notera aussi que la logique de contamination qui préside la conclusion de Ring ressemble ainsi à celle du virus informatique. Après une suite de Ring (1999), une suite au remake américain (2005) et un « kaidan » à l’ancienne (2007), le dernier film de Nakata en date, Chatroom (2010), a trait aux réseaux sociaux et poursuit la réflexion débutée par Ring.
22.05.11
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